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Cardinal R. Sarah : célébrer vers l’Orient, oui mais…

  • CLP 

En juillet 2016 le Cardinal Robert Sarah, Préfet de la Congrégation pour le Culte Divin et la discipline des Sacrements, a fait sensation en proposant de célébrer à nouveau la messe dans la forme ordinaire selon l’orientation qui prévalait avant le Concile.

Pas besoin d’aller décortiquer les forums spécialisés pour lire les réactions, il est aisé de les imaginer : les catholiques non traditionalistes vont y voir un « retour en arrière », et les catholiques traditionaliste vont jubiler.

Par ailleurs le Vatican a aussitôt réagi en précisant qu’il n’y avait ni  directives nouvelles, ni changement au Missel. Et certains se demandent si le Pape François n’aurait pas plus ou moins désavoué le fougueux Cardinal… Eh bien, comme on dit : tout le monde a tout faux !

Le Concile n’a jamais demandé que la messe soit dite face au peuple, mais seulement que cela puisse se faire, ce qui est totalement différent. Le fait que tout le clergé se soit rué sur ce qui n’est qu’une possibilité ne la transforme sûrement pas en norme ! Du coup :

  • ceux qui ont vu un « retour en arrière » dans le propos du Cardinal Sarah devraient réaliser qu’officiellement il n’y a jamais eu de trajet « aller », et donc qu’aujourd’hui il n’y a pas plus de « retour ».
  • ceux qui sont enchantés de ce retour à la tradition commettent la même erreur et ne devraient pas voir dans les propos du Cardinal une condamnation de la réforme liturgique, puisque celle-ci a toujours tenu la célébration vers l’Orient comme étant la norme.
  • ceux qui pensent que le Vatican a taclé le Cardinal se trompent, car le Vatican est bien placé pour savoir ce qui est dit ci-dessus, et en conséquence son communiqué est presque humoristique, en ce sens qu’il donne raison au Cardinal : la célébration face à l’Orient étant toujours la norme, il n’y a effectivement ni directives nouvelles ni changement au Missel !

Mais au fait, la question de la célébration face à l’Orient – ou face à Dieu – a-t-elle des conséquences sur le chant sacré ? A vrai dire elle en a une, qui est d’ordre acoustique : d’un point de vue architectural, le prêtre célèbre vers l’abside ou le rétable, et sa voix est renvoyée vers les fidèles depuis le haut du chœur.

On s’apercevra alors que dans les édifices anciens cet effet parabolique était voulu et fonctionne parfaitement, au point que dans certaines églises on pourra supprimer le micro de l’autel. A condition qu’on n’ait pas habitué les fidèles à des torrents de décibels, car il existe hélas des paroisses droguées au bruit. Quant aux édifices modernes, c’est-à-dire ceux qui ont été construits sur le principe du « face au peuple » et de la sono, on risquera d’avoir encore et toujours besoin du micro d’autel, accessoire qui permet de chuchoter bruyament (!), et qui amplifie aussi les râclement de gorge, la manipulation des pages du Missel, la fraction de l’hostie et les directives données aux enfants de chœur. Alors seulement on comprendra l’erreur collective des architectes contemporains, qui ont tourné le dos au savoir-faire des anciens par un orgueil corporatiste qui nous rappelle l’édification d’une certaine tour.